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L’alimentation riche en graisses et en sucre : une silencieuse voleuse d’os

Si vous pensez que la malbouffe arrondit vos hanches, vous avez raison. Mais il y a pire. Elle les gruge, et elle gruge aussi d’autres os dans votre corps.

La malbouffe, ou plus précisément des aliments riches en graisses et en sucre, vole au squelette des éléments essentiels dont il a besoin pour croître et conserver la solidité nécessaire lui permettant de combattre les maladies dégénératives, comme l’ostéoporose.

Ce vol est perpétré par l’entremise de deux mécanismes.

Premièrement, une alimentation riche en graisses et en sucre empêche l’absorption du calcium et provoque l’excrétion de cet élément par la voie des urines. Le calcium nécessaire à la santé des os passe donc dans le corps sans être assimilé.

Deuxièmement, les graisses saturées ont tendance à former des « savons » insolubles qui recouvrent les intestins. Cette couche empêche l’absorption du calcium dont les os ont besoin. Par conséquent, la plus grande part du calcium contenu dans le fromage d’un burger traversera les intestins sans que le corps ne puisse l’absorber.

Le tableau n’est pas rose. La malbouffe dépose des couches de graisses sur le squelette, l’affaiblit et le prive de sa capacité de soutenir des kilos supplémentaires.

Environ deux millions de Canadiennes et de Canadiens sont atteints d’ostéoporose, une maladie communément appelée « la voleuse silencieuse », puisqu’elle ne présente aucun symptôme. Elle introduit dans les os des milliers de pores minuscules et leur dérobe leur densité. Or, des os poreux peuvent casser au moindre choc.

Les femmes sont particulièrement à risque et affichent des taux d’ostéoporose deux fois supérieurs, comparativement aux hommes. Une Canadienne sur quatre âgées de plus de 50 ans souffre d’ostéoporose, et une femme sur trois âgées de plus de 65 ans subira une fracture de la hanche. Environ 20 pour cent de ces fractures liées à l’ostéoporose mènent à un décès.

Chaque année, le système de santé canadien dépense environ 1,9 million de dollars pour traiter l’ostéoporose et les fractures qui en découlent.

L’alimentation peut s’avérer un ennemi ou un allié dans la lutte contre l’ostéoporose.
Chez un enfant en pleine croissance et qui approche la puberté, les tissus osseux se multiplient rapidement. Cet enfant pourrait optimiser la croissance et l’accumulation de sa masse osseuse en consommant des aliments sains et en étant physiquement actif. Plus sa masse osseuse sera importante, plus il s’évitera des fractures causées par l’ostéoporose à des étapes ultérieures de sa vie.  Il s’agit de prévention primaire.

Les parents et les grands parents de cet enfant sont au-delà de l’étape du développement de la masse osseuse. À l’étape secondaire de leur vie, soit l’âge adulte moyen et avancé, d’autres possibilités de prévention s’offrent à eux. En ayant une alimentation saine, en étant physiquement actif et, si nécessaire, en prenant des médicaments pour ralentir la perte de masse osseuse, ils peuvent réduire le risque de fractures causées par l’ostéoporose.

Une alimentation saine est équilibrée. Elle inclut donc un éventail d’aliments : légumes, fruits et céréales entières, ainsi que des aliments faibles en graisses saturées, en sel et en sucre.

Une alimentation saine ne repose pas uniquement sur de bons choix alimentaires. Il faut aussi bien gérer les environnements qui influent sur ces choix. À ce chapitre, plusieurs options s’offrent.

Par exemple, nous pouvons limiter, de façon stricte, la teneur en gras trans dans les produits alimentaires et interdire, comme l’a fait la Californie, les gras trans dans les restaurants. Ou nous pouvons exiger, comme la Ville de New York l’a fait, que le nombre de calories soient affiché sur les menus, en mêmes caractères que les prix. Nous pouvons aussi éliminer les aliments malsains dans les lieux qui devraient véhiculer des habitudes de vie saines, comme les cafétérias d’écoles, de centres de loisirs et d’hôpitaux, ainsi que dans les distributeurs automatiques.

La situation démographique au Canada exige des actions immédiates
Les bébés-boumeurs ont été la première génération à grandir avec les aliments prêts-à-manger, et leur héritage alimentaire est riche en graisses et en sucre. Aujourd’hui, 1 600 000 enfants canadiens sont obèses ou font de l’embonpoint, soit plus de un enfant sur quatre.

Quant aux boumeurs, les plus vieux étant maintenant âgés de 66 ans, ils ont atteint une étape de vie où le risque de maladies des os et des articulations est plus présent.

Bien que certaines inquiétudes aient été exprimées quant à l’apparition précoce des maladies cardiovasculaires et du diabète causée par une alimentation riche en graisses et en sucre, peu d’attention a été accordée au fait que des millions de personnes sont beaucoup plus à risque d’être atteintes d’ostéoporose, d’une usure des articulations prématurées et d’autres troubles squelettiques qui peuvent discrètement détruire leur santé.

Nous pouvons renverser la vapeur, mais nous devons immédiatement mettre en place des mesures pour assurer la santé de nos os, et dans le processus, améliorer notre santé générale.

Cy Frank œuvre à titre d’expert-conseil à Evidence Network.ca et est directeur exécutif de l’Alberta Bone and Joint Health Institute. Il pratique la chirurgie orthopédique à Calgary, est professeur de chirurgie orthopédique au département d’orthopédie de l’Université de Calgary et au Centre multidisciplinaire McCraig pour la recherche sur les lésions articulaires et l’arthrite.

Ron Zernicke est membre du comité consultatif international de l’Alberta Bone and Joint Health Institute et professeur et doyen de la School of Kinesiology, de l’Université du Michigan. 

septembre 2012


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